LA NAISSANCE D’UN GRAND PORT MODERNE
Idéalement située au cœur du Golfe de Guinée, presque à équidistance du Cameroun et du Sénégal, la Côte d'Ivoire possède une façade maritime d'environ 500 kilomètres. Sa côte sableuse et rectiligne est « harcelée » par la barre, phénomène de déferlement de la houle se formant à une distance de 80 à 100 mètres et qui, se brisant sur le rivage, rend les côtes particulièrement difficiles d'accès.
Tout le long du littoral s’étend un vaste réseau de lagunes séparées de la mer par le « cordon littoral » et vers lesquelles affluent les différents cours d’eau qui arrosent le pays.
Les rades foraines et les wharfs
C’est au quinzième siècle qu’ont débuté les premiers échanges commerciaux entre les Européens et les autochtones de l'actuelle Côte d'Ivoire. D’abord effectués par des rades foraines, ces échanges se poursuivront plus tard (à partir du 20è siècle), à l'aide de wharfs qui offraient plus de sécurité.
Ainsi, plusieurs wharfs seront construits sur les côtes ivoiriennes au cours de la première moitié du 20e siècle :
- le premier wharf, à Grand-Bassam en 1901 ;
- le second wharf encore à Grand-Bassam en1923 ;
- le 3ème wharf à Port-Bouët en 1931 ;
- le 4ème wharf à Sassandra en 1951.
C’est par ces wharfs que s’effectueront tous les échanges maritimes de la Côte d’Ivoire jusqu’à l’ouverture du canal de Vridi et à la mise en service du Port d’Abidjan. Certains de ces Wharfs, comme celui de Sassandra, resteront en opération pendant plusieurs années même après l’ouverture du port.
Au fil des années, en raison de la croissance continue des échanges commerciaux entre les Européens et les autochtones, et de la difficulté de manutentionner de lourdes charges, le besoin de disposer d’un véritable port était déjà réel avant la réalisation des différents wharfs. En outre, même si les wharfs facilitaient la manutention des marchandises, ils ne supprimaient pas totalement les risques dus à l’état de la mer.
Ainsi, vers la fin du 19e siècle, des recherches avaient été entamées pour déterminer le meilleur emplacement du futur port.
Choix de l’emplacement du port
Les études étaient conduites le long de la côte dès 1892 sous la direction de Treich-Laplène et de Binger.
Plusieurs autres études ont par la suite été menées dont celle de Marchand en 1896, et celle des capitaines Houdaille, Thomass et Crosson-Duplessis en 1898.
Ces différentes études ont exploré les régions de :
- Grand-Bassam ;
- La rade de Sassandra ;
- Grand-Lahou
Finalement, et conformément aux conclusions de l’étude de Crosson-Duplessis, Abidjan a été choisi pour être à la fois le site du futur port et la tête de pont du chemin de fer Abidjan-Niger.
De nouvelles études seront encore effectuées afin de déterminer l’emplacement exact du futur port et notamment le lieu le plus approprié pour le percement du cordon littoral.
Plus tard, les premières tentatives de percement du littoral qui eurent lieu à l’Ouest de Port-Bouët (près de Petit-Bassam) en 1906 et 1907 se soldèrent par des échecs, les canaux ouverts étant immédiatement rebouchés par les courants de sable.
A la suite de ces échecs, plusieurs autres projets furent proposés par différents ingénieurs entre 1909 et 1929, mais aucun d’eux ne put résoudre de façon satisfaisante la question du percement du canal.
C’est en 1932 et 1933 que l’ingénieur des Ponts et Chaussées Roger Pelnard-Considère proposa un projet qui reçut l’assentiment des autorités coloniales françaises. Le projet fut soumis à une expérimentation sur modèle réduit dans le laboratoire hollandais DELFT avant d’être définitivement approuvé en décembre 1935.
Construction du Port d’Abidjan
Après l’approbation du projet de Roger Pelnard-Considère, les travaux du canal de Vridi furent adjugés à un consortium d’entreprises en 1936. Mais les travaux proprement dits ne commencèrent qu’en 1938. Ils se poursuivirent sous l’autorité successive des directeurs des Travaux Publics Levy, Pelnard-Considère, Pilot, Pougnaud, Vernisse et Jean Millier. C’est ce dernier qui acheva les travaux et devint par la suite le premier directeur du Port d’Abidjan.
Les travaux comportaient le dragage du canal, la construction de deux jetées en mer pour la protection de la passe d’entrée contre les courants de sables, l’exécution des berges protégées en enrochements et celle des tapis de fascinage lestés d’enrochements pour la protection des fonds.
Le creusement du canal s'est fait à la fois côté mer et côté lagune. Cela permit la mise en exploitation, à partir de 1948, de la partie côté mer dite "Avant port" pour soulager l’économie, alors au bord de l’asphyxie à cause de la saturation des wharfs de Grand-Bassam et de Port-Bouët.
Les travaux de construction du canal, quelque peu ralentis pendant la deuxième guerre mondiale, seront néanmoins poursuivis jusqu’au 23 juillet 1950, date à laquelle l’on fit sauter le dernier « bouchon » du canal de Vridi, mettant en communication les eaux de la lagune Ebrié et celles de l'océan atlantique.
Avec l’ouverture à la navigation du canal de Vridi naquit donc le Port d’Abidjan. Le premier navire à emprunter le canal de Vridi fut le «MARIE DOMINIQUE» et le premier navire au long cours fut le «VOLTA». Le Port d’Abidjan a été officiellement inauguré le 05 février 1951 par M. François Mitterrand, alors Ministre français des territoires d’Outre-Mer.